Expertise d'une noue en zinc sous couverture d'ardoises
Contexte
Un propriétaire constate des traces d'humidité sur le plafond rampant de sa salle de bain.
Il demande à son assureur le bénéfice de la P.J. ( Protection Juridique ) : prise en charge d'une expertise amiable contradictoire, portant sur l'ouvrage incriminé ( ici : la noue ).
Son assureur missionne un cabinet d'expertise construction pour le représenter et l'assister dans l'expertise de l'ouvrage. Celui-ci convoque le couvreur car la construction a moins de dix ans (
mobilisation de la responsabilité décennale du couvreur ).
Le couvreur fait part du sinistre à son assureur. Ce dernier missionne également un expert technique.
Les experts des deux parties ( le propriétaire et le couvreur : experts dits d'assurance ) concluent contradictoirement à un défaut d'entretien de la noue de la part du propriétaire.
Ce dernier demande une contre-expertise sur la base d'une suspicion de malfaçon au regard :
- de la dissymétrie de l'infiltration : pourquoi de l'humidité d'un côté de la noue et pas de l'autre ?
- d'autres sinistres imputés au couvreur, sur le secteur géographique.
Cette contre-expertise est présentée ici :
Constat & suspicion
Le constat consiste à identifier le sinistre :
" dégât des eaux " ( prise en charge par la P.J. du propriétaire ), ou présence d'humidité dont la cause à priori ( première suspicion ) serait une infiltration d'eau de pluie depuis la couverture jusqu'au plafond ( parement en plaques de plâtre ).
Trace d'humidité dans le plafond rampant, en placoplâtre
Investigations / suspicion : quelles sont les causes ?
A première vue, la cause de la présence d'humidité dans le plafond rampant, est l'obstruction de l'écoulement d'eau de pluie dans la noue correspondant à la zone où se manifeste l'humidité, provoquant cette infiltration sous les ardoises.
A priori ( suspicion ), la noue constituée de feuilles de zinc et d'ardoises découpées de manière à limiter la vue du zinc pour une question esthétique, pose le problème de l'accumulation de
feuilles d'arbres proches du bâtiment, empêchant l'écoulement de l'eau de pluie dans la noue. Ce serait donc la cause visible du désordre, du sinistre.
C'est la conclusion des experts missionnés par les assureurs du propriétaire et du couvreur., qui s'arrêtent à ce " constat de visu " ! Ceux-ci déterminent la cause comme étant un défaut d'entretien de la noue, ce qui se discute.
Or, il n'en est rien dans le cas exposé ici :
la cause réelle reste " invisible " sans découvrir la noue en zinc.
Noue en zinc sous couverture ardoises : localisation de la cause de l'humidité
Relevé de la côte en fond de noue = 33 mm :
rie n'interdit de " resserrer " les ardoises pour limiter la vue du zinc,
mais l'ouvrage doit jouer son rôle :
ici, l'écoulement de l'eau de pluie sans obstruction.
On constate que certaines ardoises ne sont pas maintenues ( épaulées ) de sorte à éviter leur dépassement de la ligne de rive :
ceci est un facteur aggravant le risque l'accumulation de feuilles d'arbres empêchant l'écoulement de l'eau de pluie ; cette situation demanderait de nettoyer la noue à chaque coup de vent, ce qui n'est pas recevable.
Conseil d'expert
Ne jamais se fier uniquement à ce que l'on voit ! ... les apparences sont souvent trompeuses.
Il faut toujours pousser les investigations de sorte à être certain des causes.
En effet, il est courant que l'origine d'un désordre soit un cumul de causes, en cascade.
Certains experts expliquent qu'ils ne sont pas couverts par leur assurance, pour mener des investigations nécessitant le démontage d'une noue, ou encore que leurs salariés ne sont pas couverts pour ce genre de risque professionnel, comme ici, monter sur une toiture !
Gwenan Expertise trouvera toujours une solution pour investiguer convenablement un ouvrage, objet d'un désordre.
Investigations : poursuite
L'investigation consiste à voir ce que l'on ne peut pas voir : ici, la cause réelle des infiltrations.
Noue en zinc découverte : investigation " à nue "
La poursuite des investigations permet de mettre au jour la noue en zinc et de constater :
> un côté de la noue en zinc n'a pas été replié de sorte à réaliser un joint avec les ardoises évitant tout risque de remontée d'eau au-delà de la noue en zinc ( une " pince " ( le pli de la
tôle ) de 15 mm selon les règles de l'art - cf. paragraphe suivant )
> l'autre côté de la noue présente une pince de 10 mm
Mesure du développé du fond de noue (zinc) / bord plié = 85 mm
pli ( pince ) = 10 mm
Investigations / suspicion : vérification
Après investigations complètes et sérieuses, il s'agit de vérifier la conformité ou la non conformité de l'ouvrage mis en cause. Cette vérification doit être faite selon un référentiel, une règle
commune, dite " règles de l'art ". En général, les D.T.U. ( Documents Techniques Unifiés ) font référence en tant que règles de l'art.
Le DTU 40.11. Travaux de bâtiment - Couverture en ardoises précise pour une noue en zinc :
- recouvrement d'ardoises sur une largeur de 60 mm, hors pince,
- pince de 15 mm
La chaîne de côtes est donc la suivante :
> fond de noue / bord de la pince = 85 mm
> fond de noue / rive ardoises = 33 mm
ce qui implique un recouvrement d'ardoises de 52 mm sur le zinc, ce qui est inférieur aux 60 mm minimum requis par le DTU.
De plus le pli mesure 10 mm = non conformité : 15 mm minimum requis par le DTU.
On peut constater également que les traces d'humidité côté intérieur du bâtiment se trouvent du côté de la rive où il n'y a pas de pince.
Cause
Les investigations permettent d'établir la ou les causes du désordre, du sinistre.
Ici, il s'agit d'une malfaçon car non respect des principes techniques préconisés par les règles de l'art, en particulier l'absence d'une pince d'un côté de la noue où l'infiltration est
constatée.
Responsabilités *
La ou les causes, conjuguées aux contrats de travaux, permettent de déterminer la ou les responsabilités.
Ici, la seule responsabilité du couvreur est mise en cause.
* Nota : la première conclusion des experts ( avant cette contre-expertise ) est le défaut d'entretien de la noue par le propriétaire. Cette conclusion, fausse, n'engage pas la responsabilité des experts sur le plan de la construction ( " assurance décennale " ) ; seule leur responsabilité liée à leur mission d'expertise peut être recherchée pour un éventuel dédommagement du propriétaire au titre d'un préjudice.
Conclusions
Les conclusions portent essentiellement sur :
> la synthèse du sinistre : éléments techniques
> la synthèse des causes et des responsabilités
> la suite à donner : elle dépend de la situation du propriétaire, du ou des professionnels, des assureurs
Par exemple, cette expertise d'assuré a permis de demander au couvreur la prise en charge des travaux de réfection de la noue et des travaux de peinture, ainsi qu'un dédommagement du préjudice subi par le propriétaire causé par le manque d'investigations des experts d'assurance.
Budget
de l'ordre de 950 € à 1 900 € TTC, selon l'ampleur, la durée de la procédure (nombres de réunions d'expertise, d'échanges de courriers, de mises en demeure, etc.)